Sans titre, Jean Amado, 1965
Patrimoine
Sans titre, Jean Amado, 1965
Béton émaillé
Bâtiments de Chimie et de Biologie (UGA)
421 rue de la Chimie, Gières
Découvrir l'œuvre
L’œuvre de Jean Amado a été acquise dans le cadre du 1% artistique des bâtiments de Chimie achevés vers 1965. Elle est composée de deux parties : d’une part la sculpture, et d’autre part un plot portant une plaque de signalisation.
Sans titre est en béton émaillé, une technique qu’Amado utilisait avant de mettre au point le Cérastone. La sculpture elle-même est constituée en trois parties certainement travaillées séparément puis assemblées. Les jointures sont visibles et prennent l’aspect de fissures qui entrent en résonnance avec cette impression d’érosion que l’on trouve au cœur de la sculpture.
Sans titre n’est pas figurative. Amado ne souhaite pas représenter une forme connue, il cherche seulement à rendre son rêve, réalité. Sans titre, comme bien d’autres de ses œuvres, n’est pas non plus porteuse d’un message. François Mathey dira de lui : « il se contente de nous livrer des blocs de ciment assemblés (…) A vous de jouer si vous voulez absolument comprendre ». De manière générale d’ailleurs, Amado précise qu’il n’y a aucun élément intellectuel dans son travail, et « qu’il faut que cela pousse de soi-même ».
Le plus souvent, ses œuvres sont de grands blocs creusés, évidés, troués, qui peuvent rappeler l’érosion naturelle, le creusement de galeries animales ou humaines dans les falaises et la terre, ou bien les fissures et les plissements des montagnes. Pour décrire le travail de Jean Amado, François Mathey dira : « ces titres donnent à penser que l’auteur se complet dans un univers où il est question de vent, d’eau, bien entendu de pierre ou d’animal, avec des allusions apparemment littéraires qui nous impliquent dans un domaine très lointain dans l’espace et le temps ou qui nous glissent dans un rêve éveillé où le passé épouse la réalité, où surgissent curieusement à la surface des tréfonds oubliés de la mémoire ».
Francis Finidori, quant à lui, décrypte : « Je note deux dimensions du temps dans cette sculpture : d’abord un mouvement imperceptible, tellurique, géologique (relevant d’une ère secondaire), puis un mouvement à rebours, qui concerne l’hypothèse d’un habitat humain à la surface ou dans l’épaisseur des parois. La première est lente, inexorable : elle évoque l’érosion (vent, sable, eau), la fatigue érodante, la fatigue contredite. L’autre est comme un repos, la présence lénifiante d’une implantation humaine suggérée, avec les repères plus anecdotiques des chemins, des tours, des fenêtres ».
Sans titre est en béton émaillé, une technique qu’Amado utilisait avant de mettre au point le Cérastone. La sculpture elle-même est constituée en trois parties certainement travaillées séparément puis assemblées. Les jointures sont visibles et prennent l’aspect de fissures qui entrent en résonnance avec cette impression d’érosion que l’on trouve au cœur de la sculpture.
Sans titre n’est pas figurative. Amado ne souhaite pas représenter une forme connue, il cherche seulement à rendre son rêve, réalité. Sans titre, comme bien d’autres de ses œuvres, n’est pas non plus porteuse d’un message. François Mathey dira de lui : « il se contente de nous livrer des blocs de ciment assemblés (…) A vous de jouer si vous voulez absolument comprendre ». De manière générale d’ailleurs, Amado précise qu’il n’y a aucun élément intellectuel dans son travail, et « qu’il faut que cela pousse de soi-même ».
Le plus souvent, ses œuvres sont de grands blocs creusés, évidés, troués, qui peuvent rappeler l’érosion naturelle, le creusement de galeries animales ou humaines dans les falaises et la terre, ou bien les fissures et les plissements des montagnes. Pour décrire le travail de Jean Amado, François Mathey dira : « ces titres donnent à penser que l’auteur se complet dans un univers où il est question de vent, d’eau, bien entendu de pierre ou d’animal, avec des allusions apparemment littéraires qui nous impliquent dans un domaine très lointain dans l’espace et le temps ou qui nous glissent dans un rêve éveillé où le passé épouse la réalité, où surgissent curieusement à la surface des tréfonds oubliés de la mémoire ».
Francis Finidori, quant à lui, décrypte : « Je note deux dimensions du temps dans cette sculpture : d’abord un mouvement imperceptible, tellurique, géologique (relevant d’une ère secondaire), puis un mouvement à rebours, qui concerne l’hypothèse d’un habitat humain à la surface ou dans l’épaisseur des parois. La première est lente, inexorable : elle évoque l’érosion (vent, sable, eau), la fatigue érodante, la fatigue contredite. L’autre est comme un repos, la présence lénifiante d’une implantation humaine suggérée, avec les repères plus anecdotiques des chemins, des tours, des fenêtres ».
Jean Amado (1922-1995)
Jean Amado commence sa carrière en tant que céramiste, expliquant qu’il « [pensait] pouvoir vivre de services à thé et à café ». En réalité, il a peu à peu envie de travailler sur de plus grandes dimensions, et crée par exemple pour Alger en 1945 une fontaine en terre cuite émaillée, mesurant 40 mètres de haut sur 6 mètres de large. Cependant, l’utilisation de la terre cuite pour des projets de grande dimension pose d’énormes problèmes techniques. Grâce à un ami parlant d’huisseries en béton, Jean Amado a l’idée de faire du béton émaillé. Il fabrique alors des dalles émaillées et s’essaie au bas-relief.
Ses recherches techniques aboutissent en 1957 à la création du Cérastone, un médium plus solide et d’un poids plus léger que la céramique ou le béton habituel. Le Cérastone est obtenu à l’aide d’un mélange de basalte, de ciment réfractaire et d’eau.
En 1963, suite au décès de son épouse, il fait sa première sculpture : un grand crâne. Naît en lui le besoin de réaliser un travail de sculpteur et non plus un travail d’artisan. Ce souhait implique plusieurs questions : comment montrer, comment exposer les travaux qui découleraient d’un travail artistique ? Une réponse est esquissée grâce à Jean Dubuffet, qui fait le lien entre Amado et son marchand d’art ; il fait ainsi une première exposition en 1970. Alors qu’Amado ne vivait que de commandes (entre autres des reproductions ou des agrandissements de sculptures, signées par exemple de Dubuffet), les travaux qu’il classe comme « artistiques » sont ceux qui ne correspondent à aucune commande. Il explique : « Quand on a une commande, il faut qu’elle soit rentable, on entre dans le domaine de la production et du prix marchandise. Avec une chose pas commandée, le temps de compte pas : on y met de la vie, pas du rentable… ».
Il sera plus rapidement connu en Norvège, en Allemagne et en Hollande qu’en France, où sa première rétrospective ne sera organisée qu’en 1985. Au cours de sa carrière, il fera plusieurs commandes publiques, par exemple pour Aix-en-Provence, Marseille, Otterlo et le campus de Saint-Martin-d’Hères/Gières.
Ses recherches techniques aboutissent en 1957 à la création du Cérastone, un médium plus solide et d’un poids plus léger que la céramique ou le béton habituel. Le Cérastone est obtenu à l’aide d’un mélange de basalte, de ciment réfractaire et d’eau.
En 1963, suite au décès de son épouse, il fait sa première sculpture : un grand crâne. Naît en lui le besoin de réaliser un travail de sculpteur et non plus un travail d’artisan. Ce souhait implique plusieurs questions : comment montrer, comment exposer les travaux qui découleraient d’un travail artistique ? Une réponse est esquissée grâce à Jean Dubuffet, qui fait le lien entre Amado et son marchand d’art ; il fait ainsi une première exposition en 1970. Alors qu’Amado ne vivait que de commandes (entre autres des reproductions ou des agrandissements de sculptures, signées par exemple de Dubuffet), les travaux qu’il classe comme « artistiques » sont ceux qui ne correspondent à aucune commande. Il explique : « Quand on a une commande, il faut qu’elle soit rentable, on entre dans le domaine de la production et du prix marchandise. Avec une chose pas commandée, le temps de compte pas : on y met de la vie, pas du rentable… ».
Il sera plus rapidement connu en Norvège, en Allemagne et en Hollande qu’en France, où sa première rétrospective ne sera organisée qu’en 1985. Au cours de sa carrière, il fera plusieurs commandes publiques, par exemple pour Aix-en-Provence, Marseille, Otterlo et le campus de Saint-Martin-d’Hères/Gières.
Le procédé créatif et le milieu de l’art vus par Jean Amado
Jean Amado estime que son travail se partage en deux catégories : des créations qui répondent à une commande et donc à une chose précise, ou bien des créations qui lui sont propres. Il considère que ses créations personnelles sont plus artistiques et correspondent donc à un travail d’artiste, tandis que les commandes se rapprochent plus d’un travail d’artisan.
Amado ne souhaite rien d’intellectuel et déclare même : « il faut que ça pousse de soi-même ». Ses créations artistiques sont le fruit d’un travail préparatoire intense et presque douloureux : « C’est un besoin que je recule, que je retarde, car j’ai déjà la crainte de ne pas réussir à y répondre, à le combler… Je commence par un dessin. Le dessin, (…) ça me permet de sérier les problèmes. Il y a d’abord un objet, un détail plutôt, une chose en suspens, bourrée de possible. Le dessin concrétise tout ça, mais en le dépoétisant. Il ne reste qu’un truc sec, décevant, que je raccorde tant bien que mal au besoin premier en essayant de penser maintenant au côté esthétique… A force de tracer, de penser, la chose finit par gonfler. J’imagine le volume, je dessine la silhouette. Cela prend des jours, mais alors je connais tellement la chose que sa réalisation va de soi. Je me mets au travail, et la clarté se perd. Il faut commencer à plat, par le bas, et là on ne voit rien » (Jean Amado – 1974)
Jean Amado n’est pas figuratif, « il ne représente pas, il n’impose aucune forme connue et il se moque de l’esthétique ; par contre il est à peu près satisfait quand l’œuvre s’identifie à son rêve. (…) On n’a pas fini de gloser sur le message d’Amado, surtout quand il refuse d’être porteur de quoi que ce soit. Là-dessus, il est muet. Il se contente de nous livrer des blocs de ciments assemblés. (…) Ces titres donnent à penser que l’auteur se complaît dans un univers où il est question de vent, d’eau, bien entendu de pierre ou d’animal, avec des allusions apparemment littéraires qui nous impliquent dans un domaine très lointain dans l’espace et le temps ou qui nous glissent dans un rêve éveillé où le passé épouse la réalité, où surgissent curieusement à la surface les tréfonds oubliés de la mémoire » (François Mathey, 1985).
Jean Amado a une conception de l’art très personnelle et simple : il estime que l’ « art » correspond à une notion de chose imaginée, réalisée puis vendue, qui échappe au circuit de production dans le sens où cette chose n’est pas situable en prix. Il estime qu’ « une œuvre ne devrait pas se vendre » et qu’en conséquence l’Etat devrait le nourrir « moyennant fourniture d’un certain travail », pour avoir ainsi « la possibilité de céder les autres œuvres à des particuliers, non pas à des prix de collection, mais au prix du travail ». De manière générale, il estime qu’il n’y a « pas de raison que ça vaille cher », ce à quoi il ajoute : « Il est vrai que pas de raison non plus qu’un cadre supérieur gagne tellement plus qu’un ouvrier… ».
Sa vision modeste de l’art et de l’artiste s’étend à la description qu’il fait de sa façon de travailler. Il se qualifie de tâcheron qui œuvre avec lenteur, patience, en prenant du temps, mais avec obstination. « Il faut que le temps passe et nourrisse (…) pour le reste, j’évolue en fonction de ce qui arrive ».
Le matériau a une grande importance aux yeux d’Amado. Il explique que le matériau ne permet pas à l’artiste de faire ce qu’il veut : « il a sa propre vie, et il s’agit d’accorder à cette vie celle de la forme que je cherche. Il faut compter aussi avec le poids, ne pas faire des morceaux trop lourds ». Cette contrainte du poids oblige Amado à faire des œuvres en plusieurs parties qui sont jointes les unes aux autres. Il donne aux joints, ces parties nées de contraintes techniques, « l’aspect de fissures, de cassures, c’est à travers les failles que le vivant revient ».
Amado ne souhaite rien d’intellectuel et déclare même : « il faut que ça pousse de soi-même ». Ses créations artistiques sont le fruit d’un travail préparatoire intense et presque douloureux : « C’est un besoin que je recule, que je retarde, car j’ai déjà la crainte de ne pas réussir à y répondre, à le combler… Je commence par un dessin. Le dessin, (…) ça me permet de sérier les problèmes. Il y a d’abord un objet, un détail plutôt, une chose en suspens, bourrée de possible. Le dessin concrétise tout ça, mais en le dépoétisant. Il ne reste qu’un truc sec, décevant, que je raccorde tant bien que mal au besoin premier en essayant de penser maintenant au côté esthétique… A force de tracer, de penser, la chose finit par gonfler. J’imagine le volume, je dessine la silhouette. Cela prend des jours, mais alors je connais tellement la chose que sa réalisation va de soi. Je me mets au travail, et la clarté se perd. Il faut commencer à plat, par le bas, et là on ne voit rien » (Jean Amado – 1974)
Jean Amado n’est pas figuratif, « il ne représente pas, il n’impose aucune forme connue et il se moque de l’esthétique ; par contre il est à peu près satisfait quand l’œuvre s’identifie à son rêve. (…) On n’a pas fini de gloser sur le message d’Amado, surtout quand il refuse d’être porteur de quoi que ce soit. Là-dessus, il est muet. Il se contente de nous livrer des blocs de ciments assemblés. (…) Ces titres donnent à penser que l’auteur se complaît dans un univers où il est question de vent, d’eau, bien entendu de pierre ou d’animal, avec des allusions apparemment littéraires qui nous impliquent dans un domaine très lointain dans l’espace et le temps ou qui nous glissent dans un rêve éveillé où le passé épouse la réalité, où surgissent curieusement à la surface les tréfonds oubliés de la mémoire » (François Mathey, 1985).
Jean Amado a une conception de l’art très personnelle et simple : il estime que l’ « art » correspond à une notion de chose imaginée, réalisée puis vendue, qui échappe au circuit de production dans le sens où cette chose n’est pas situable en prix. Il estime qu’ « une œuvre ne devrait pas se vendre » et qu’en conséquence l’Etat devrait le nourrir « moyennant fourniture d’un certain travail », pour avoir ainsi « la possibilité de céder les autres œuvres à des particuliers, non pas à des prix de collection, mais au prix du travail ». De manière générale, il estime qu’il n’y a « pas de raison que ça vaille cher », ce à quoi il ajoute : « Il est vrai que pas de raison non plus qu’un cadre supérieur gagne tellement plus qu’un ouvrier… ».
Sa vision modeste de l’art et de l’artiste s’étend à la description qu’il fait de sa façon de travailler. Il se qualifie de tâcheron qui œuvre avec lenteur, patience, en prenant du temps, mais avec obstination. « Il faut que le temps passe et nourrisse (…) pour le reste, j’évolue en fonction de ce qui arrive ».
Le matériau a une grande importance aux yeux d’Amado. Il explique que le matériau ne permet pas à l’artiste de faire ce qu’il veut : « il a sa propre vie, et il s’agit d’accorder à cette vie celle de la forme que je cherche. Il faut compter aussi avec le poids, ne pas faire des morceaux trop lourds ». Cette contrainte du poids oblige Amado à faire des œuvres en plusieurs parties qui sont jointes les unes aux autres. Il donne aux joints, ces parties nées de contraintes techniques, « l’aspect de fissures, de cassures, c’est à travers les failles que le vivant revient ».
En savoir plus
Site internet dédié à l’artiste : https://www.jeanamado.com/
Les Sculptures de Jean Amado, [le doute et la pierre : exposition, Paris, Musée des Arts décoratifs, 25 avril-13 juillet 1985 / sous le commissariat de François Mathey et Daniel Marchesseau], Paris, Musée des Arts décoratifs – Flammarion, 1985
PONS Louis, « Jean Amado » in Cimaise, art et architecture actuels, 20e année, n°110-111, Janvier-février-mars-avril 1973, Paris, Société Mondiale d’Impression.
Les Sculptures de Jean Amado, [le doute et la pierre : exposition, Paris, Musée des Arts décoratifs, 25 avril-13 juillet 1985 / sous le commissariat de François Mathey et Daniel Marchesseau], Paris, Musée des Arts décoratifs – Flammarion, 1985
PONS Louis, « Jean Amado » in Cimaise, art et architecture actuels, 20e année, n°110-111, Janvier-février-mars-avril 1973, Paris, Société Mondiale d’Impression.
Mis à jour le 8 mars 2024